BAISSE DES COMPÉTENCES EN ORTHOGRAPHE ? (Suite)

Nous reprenons l’article dont il était question la semaine dernière à propos des (in)compétences des enfants à transcrire certains termes/ Nous avions examiné le mot « aussitôt », voyons ce qui est écrit pour « peut-être » :

« L’adverbe « peut-être« , qui concentrait déjà certaines difficultés en 1987, continue de poser problème aux élèves de CM2 aujourd’hui. Seuls 52% d’entre eux n’ont pas fait de fautes à ce mot en 2021. »

On remarque que ce terme concentrait déjà certaines difficultés en 1987, sans savoir le pourcentage de réussite des élèves concerné.es. Il est, par ailleurs, difficile de comprendre à quoi se réfère l’adverbe « aujourd’hui » dans cette partie de l’article : 2021 année de la constatation ou 2023, année de parution de l’article ?

Comme nous l’avions fait pour l’adverbe « aussitôt » la semaine dernière, examinons ce que nous disent les recherches :

  • Dans l’Echelle DUBOIS-BUYSE, ce terme est classé comme écrit selon la norme à l’échelon 24, soit en première année de secondaire. Rappelons que cette échelle a été mise sur le marché en 1940 et qu’elle fait état des compétences de cette époque.
  • ÉOLE (Echelle d’acquisition en Orthographe LE xicale) qui analyse des compétences des élèves en orthographe lexicale du début du XXIème siècle, montre les résultats suivants : CP 4%, CE1 20%, CE2 30%, CM1 53%, CM2 87%. Est-ce à dire que les élèves des années 200 serait meilleurs que leurs ainés de 1940 ?

La difficulté de cet adverbe réside dans le tiret obligatoire entre les deux composantes qui, s’il venait à faire défaut prendrait une tout autre signification… Les élèves ne peuvent imaginer cette graphie, ils doivent être enseigné.es de cette particularité. La langue orale ne laisse aucunement présager que ce mot, dit en une seule fois, doit se scinder en deux à l’écrit ! 87% en CM2 est un très joli score qui vient contredire le catastrophisme de l’article en question !

La suite de l’article de Camille Pineau présentait un troisième terme en précisant : « Quant à « certainement » ils étaient moins d’un élève sur deux à savoir l’écrire. »

  • Intuitivement, ce terme nous parait difficile parce qu’il contient le phonème [ɑ̃] qui peut se transcrire de multiple façons en français et principalement « an » ou « en » à égalité des apparitions ou peut s’en faut : 49% vs 51%…
  • Par ailleurs, les adverbes en [mɑ̃], posent le problème du doublement de la consonne ‘m’ ou pas ! D’après ÉOLE, 266 mots avec cette terminaison (un seul ‘m’) ont été réussis par les élèves de CM2. Parmi ceux-ci : Curieusement, facilement, continuellement, correctement, définitivement, durement, etc. Cependant, il faut doubler la consonne pour comment, puissamment, bruyamment, élégamment, couramment, etc.
  • Nous avons évoqué la graphie du phonème [s] la semaine dernière (pour le terme « aussitôt »), le problème de choix est le même ici, même si à l’initiale le choix se restreint un peu.
  • Le phonème [ɛ] peut également faire l’objet de choix multiples, à savoir comme dans : la mer, la mère, la maire, la peine, le pays, le poney, etc.

Comme on le voit ce qui peut paraitre aisé à celui/celle qui sait constitue de véritables chausse-trappes pour un.e apprenant.e !

Les enfants – de quelque génération que ce soit – sont capables d’apprendre l’orthographe lexicale de la langue française, mais apprentissage va de pair avec enseignement. On peut compter sur une certaine maturation de l’esprit et de la réflexion chez l’adulte en devenir, mais cet espoir ne fonctionnera pas tout seul ! Les articles catastrophistes rencontrent un public complaisant qui ne cherche qu’à hurler avec les loups. Cela ne constitue pas un remède à ce qui est décrié. Nous verrons la semaine prochaine quelques explications de ce phénomène de « possible » recul des compétences en orthographe des élèves français, mais quoi qu’il en soit, ce n’est pas de se lamenter, les bras croisés, qui fera changer cet état de fait. Faisons appel à la recherche !

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